LES LICENCES DE DROIT DE COPIE DANS LE MONDE

Fiche technique

Première mise en ligne 27 novembre 2000


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Présentation

Une licence est un contrat aux termes duquel un titulaire de droit intellectuel autorise une autre personne à exploiter ce droit, généralement dans certaines limites, et moyennant éventuellement le paiement d’une redevance.
La diffusion de copies d’œuvres d’auteurs étant considérée comme illicite dans la plupart des cas, les éditeurs ont conçu divers systèmes pour faire en sorte que les diffuseurs de copies ne soient plus dans l’illégalité. Tous ces systèmes passent par le paiement d’une redevance à des sociétés de gestion collectives des droits.
De par le monde il existe trois systèmes de licence de droit de copie.

Licence contractuelle, licence légale, licence obligatoire

La licence contractuelle consiste à autoriser par contrat la diffusion de copies d’œuvres d’auteurs. Le contrat est passé entre la société de gestion collective et le diffuseur de copies. C’est le système que le CFC, ancien régime, a essayé d’instaurer en France. C’est aussi le système qui prévaut aux USA et au Royaume-Uni. Dans ce cadre, le tarif est librement négocié au cas par cas entre la société centralisatrice et le diffuseur de copies.

La licence légale est un système par lequel l’autorité étatique impose uniformément à tout diffuseur de copies une redevance dont les conditions de tarif et de versement sont fixées par un texte légal. Ce système est en vigueur dans plusieurs pays d’Europe du nord.

La licence obligatoire – ou licence mixte – est le système par lequel l’autorité étatique ne fixe pas les tarifs ni les conditions de versement des droits mais fait obligation aux partenaires (sociétés de gestion et diffuseurs) de négocier, à l’image des conventions collectives de droit social.
Il semble que ce soit dans ce dernier système que la France se soit engagée à l’issue du vote du la loi du 3 janvier 1995. Ce système est également en vigueur dans certains pays d’Europe continentale.



Avantages et inconvénients de chaque système

Licence contractuelle :
A l’évidence la licence contractuelle présente le défaut (que nous avons souvent dénoncé) d’être profondément inégalitaire au départ puisque c’est le premier partenaire qui accepte de signer qui commence à payer, les plus récalcitrants (ou les plus puissants) des diffuseurs restant le plus longtemps exonérés de tout paiement. Certes les dirigeants du CFC avaient-ils eu bien conscience de ce défaut et ils avaient imaginé un système de dates de référence ans les conventions. Dans un secteur donné, il était prévu que tous les contrats signés s’appliqueraient rétroactivement à une date commune. Sans s’attarder sur la douteuse licéité de telles clauses rétroactives, il n’en reste pas moins que d’un secteur à l’autre, l’inégalité demeurait. En pratique, cette parade n’a pas eu beaucoup de succès, et c’est pourquoi les éditeurs ont fini par obtenir du législateur un changement de régime.

L’autre inconvénient est la lourdeur du système. En effet, l’esprit d’une telle licence est de cerner au mieux l’exploitation des droits de chaque auteur (c’était du moins l’intention avouée de départ). Il s’ensuit que dans un système de licence contractuelle, il faut connaître précisément qui est copié, en combien d’exemplaires, etc. D’où l’exigence de tenue de statistiques précises des photocopies effectuées, ce qui représente un travail assez lourd dans les centres de documentation. Là encore, les plus grands principes trouvent de curieuses distorsions… Le CFC s’est très vite contenté de la mention des éditeurs copiés, et du nombre de pages, à l’exclusion de la mention, jugée trop contraignante à collecter des noms des auteurs… De sorte que la moitié de la raison d’être d’une telle licence, évaluer au plus près des intérêts des auteurs devenait caduque.

Comme cette charge de tenir des statistiques était encore trop mal acceptée par les rares partenaires acceptant de négocier avec le CFC, le système des enquêtes par échantillonnage s’est substitué un peu partout (pratique héritée des pays anglo-saxons) au régime du relevé complet : un pointage des copie est réalisé sur une période prise comme référence (entre 15 jours et 2 mois par an) et extrapolée sur l’année entière. Les sommes dues sont calculées sur cette base. On le voit, une nouvelle fois, la précision tant vantée de la licence contractuelle avait dès son implantation en France du plomb dans l’aile…

Un très gros autre défaut à la licence contractuelle est son coût. Assise sur peu de «partenaires», elle est d’emblée très élevée. C’est du moins ainsi qu’on présentait les choses dans les dernières années 80 (Salon Interpress 1987). En réalité, avec le recul du temps, cet argument paraît assez illogique, pour ne pas dire franchement insoutenable. C’est avouer en fait que seuls ceux qui payent le font pour ceux qui ne payent pas. L’action du CFC n’aurait été sur le terrain privé (droit privé des auteurs et de leurs ayants cause, les éditeurs), leurs agissements seraient tombés sous le coup du principe d’inégalité des citoyens devant les charges publiques… En fait le CFC calculait ses tarifs sur la base du coût de revient total à la page, et non sur celle du droit d’auteur perdu . Mais ceci est un autre sujet…

Licence légale
La licence légale a pour mérite de répartir largement et égalitairement le paiement de droits entre les débiteurs concernés. De plus, la pratique montre que les tarifs sont très largement inférieurs à ceux pratiques dans les pays de licence contractuelle (dans un rapport de 1 à 10, voire plus). Il faut signaler que la licence légale est établie dans des pays dont les citoyens sont dotés d’un sens civique supérieur à celui des pays latins…
Son inconvénient est certes la lourdeur des procédures de révisions des redevances. Et aussi son aveuglement par rapport aux auteurs, car il est en général impossible de connaître précisément les auteurs copiés.

Licence obligatoire
Pratiquée dans son intégralité, elle peut sembler le meilleur système. Non totalement contraignant comme la licence légale (encore que le loi étant l’émanation de la volonté générale, on peut penser que le législateur «négocie»), mais largement implantée (tout le monde a obligation de passer des conventions avec les sociétés de gestion collective), elle permet un espace de négociation.
La pratique française en vigueur depuis juillet 1996 (date d’agrément du CFC) présente-t-elle ces caractères ? La réponse est malheureusement non, puisque les instance du CFC entendent le terme convention dans un sens de «contrat d’adhésion». Dans le système qui tente de s’implanter, les tarifs sont unilatéralement fixés par le CFC en dehors de tout esprit de concertation avec les acteurs en présence. Le terme de convention visé par la loi perd alors tout son sens…